Droit en France : compétence du juge judiciaire en matière de propriété intellectuelle
Publié le 5 juillet 2011
La Cour de cassation vient de publier sur son site, un arrêt du Tribunal des conflits portant sur la responsabilité en matière de propriété intellectuelle. Cette juridiction spéciale est chargée de régler les conflits de compétence entre les juridictions de l'ordre judiciaire et celles de l'ordre administratif. Composée paritairement de quatre magistrats de la Cour de cassation, et de quatre Conseillers d'État, elle est, en principe, présidée par le Garde des Sceaux. Ce dernier se prononce exceptionnellement en cas de partage des voix. La dernière affaire en date est l'arrêt du 12 mai 1997. Jacques Toubon, alors Garde des Sceaux, avait fait pencher la balance en faveur du juge administratif provoquant une polémique dans les milieux judiciaires français.
Dans cette affaire, la Société d'équipements industriels urbains avait assigné en contrefaçon la société Frameto et la commune de Ouistreham devant le tribunal de commerce de Caen. La société requérant voulait interdire la fabrication, l'importation, la détention,la distribution, l'exposition, la reproduction et la vente de toute barrière ou potelet constituant la contrefaçon d'un modèle qu'elle avait déposé devant l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle. Des dommages-intérêts ont été, en outre, réclamés devant cette juridiction.
Voyant qu'une des parties défenderesses était une collectivité publique, le tribunal de commerce avait décliné sa compétence sur l'ensemble du litige. Cette incompétence ratione materiæ fut confirmée par la suite par la cour d'appel de Caen. La société requérant a donc porté l'affaire devant le tribunal administratif de Caen. Celui-ci, n'étant pas convaincu de la compétence du juge administratif, a renvoyé l'affaire devant le Tribunal des conflits. Bien lui en a pris.
Dans un considérant de principe, le Tribunal rappelle que « la responsabilité qui peut incomber à l'État ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est en principe soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative. » En revanche, l'article L. 521-3-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que « Les actions civiles et les demandes relatives aux dessins et modèles sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance, y compris lorsqu'elles portent à la fois sur une question de dessins et modèles et sur une question connexe de concurrence déloyale. » Il résulte donc de ces dispositions que le législateur a entendu, par dérogation aux principes gouvernant la responsabilité des personnes publiques, faire relever de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire la recherche de la responsabilité des personnes morales de droit public en raison d'une contrefaçon de dessins et modèles qui leur serait imputée.
Par suite, la mise en jeu de la responsabilité de la commune de Ouistreham en raison des fautes qu'elle aurait commises en installant, sur une dépendance de la voire communale, des barrières et potelets en méconnaissance des droits que la Société industrielle d'équipements urbains détiendrait sur un modèle de barrière ressortit également à la compétence de la juridiction judiciaire.
Voir aussi
Sources
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- ((fr)) – « Décision 3770 du 2 mai 2011 ». Cour de cassation, 5 juillet 2011.