Droit en France : le Tribunal administratif de Dijon épingle la Poste en matière d'avancement des fonctionnaires en congé maladie

Publié le 12 juin 2009
Le Tribunal administratif a épinglé la Poste en matière d'avancement de ses fonctionnaires en congé maladie. Le fonctionnaire intéressé ayant souffert d'une pathologie nécessitant son placement en congé de longue maladie du 17 janvier 2005 au 16 janvier 2006. Durant ce laps de temps, Marc (c'est son prénom) s'est vu proposé l'inscription au tableau d'avancement pour entrer dans un corps de niveau supérieur, celui des agents techniques et de gestion du premier niveau.Sa candidature reçoit un accueil favorable, et le président du conseil d'administration de La Poste le nomme à ce grade avec effet fixé à la date du 30 novembre 2005, par une décision en date du 18 novembre 2005. Cette décision a été confirmée par un nouveau courrier en date du 22 novembre 2005.

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Or, la nomination dans ce grade n'intervient pas. S'étonnant de l'absence de nomination dans ledit grade, Marc écrit à son service d'attache. Le 3 novembre 2006, le couperet tombe : la nomination dans son nouveau grade à la condition d’une reprise de l’exercice effectif de ses fonctions avant l’expiration d’un délai d’un an à compter de l’établissement de la liste d’aptitude, indique la directrice des ressources humaines de la Bourgogne.

Se trouvant dans une impasse, Marc décide de saisir la justice, en l'occurence, le Tribunal administratif de Dijon, par une requête datée du 26 février 2007. Entretemps, sa maladie l'amène à solliciter un congé de longue durée qu'il obtient.

Une suite rocambolesque

La suite devient rocambolesque. Peu de jours après, il reçoit un courrier le nommant dans le grade désiré avec effet au 31 décembre 2006, et non pas au 30 novembre 2009. La décision est datée du 29 janvier 2007, soit un mois avant le dépôt de son recours.

Plusieurs mois après et, après avoir reçu communication du recours, La Poste annule sa promotion le 21 août 2007. Cette annulation s'accompagne, sans préavis, d'un rappel brutal du « trop perçu » de son salaire, ne lui laissant moins du RMI pour vivre. La directrice des RH Bourgogne estime que le placement d'un fonctionnaire en congé longue durée « invalide » son inscription à un tableau d'avancement. S'indignant d'un tel sort, l'intéressé formule une réclamation sommant la Poste de le rétablir dans son grade en application de la jurisprudence Ternon[1]. La décision étant devenue définitive au 31 mai 2007, la Poste ne pouvait plus la retirer pour illégalité.

Et la Poste fait machine arrière, et rétablit Marc dans ses droits.

Le Tribunal donne raison au requérant

Le Tribunal administratif de Dijon donnera, par la suite, raison au requérant sur deux moyens invoqués. Dans un jugement en date du 26 avril 2009, le magistrat spécialement désigné rappelle la jurisprudence Ternon[1] aux termes desquels « sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l’administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits. si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. » Ainsi, la Poste ne pouvait, près d'un an après, retirer sa promotion après inscription au tableau d'avancement.

De plus, la juridiction dijonnaise bat en brêche le raisonnement invoqué par la Poste selon lequel un agent placé en longue maladie fait obstacle à son avancement de grade. Selon le juge, en vertu de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et de l’article 40 du décret du 14 mars 1986 susvisé, qui sont applicables aux agents de la Poste ayant conservé le statut de fonctionnaires, les fonctionnaires placés en congé de longue durée ne sont pas, de ce seul fait, privés du droit à être inscrit à un tableau d’avancement et d’être promus à un grade supérieur. Par suite, La Poste, qui ne pouvait légalement ajouter au droit de son agent d’être nommé dans son nouveau grade une condition relative à l’exercice effectif des fonctions, ne pouvait, pour ce motif, retirer les décisions des et 22 novembre 2005 lesquelles n’étaient entachées d’aucune illégalité sur ce point.

Par le passé, la Cour administrative d'appel de Paris avait eu l'occasion de trancher cette question de droit. Dans un arrêt rendu le 2 octobre 1990, la Cour a notamment indiqué que « les fonctionnaires placés en position de congé longue durée demeurent en position d'activité et conservent notamment leurs droits à avancement. » Cette position a été confirmée, par la suite, par le Conseil d'État[2] : « les fonctionnaires placés en congé de longue durée ne sont pas, de ce seul fait, privés du droit à être inscrit à un tableau d'avancement ».

Et au tribunal d'enfoncer le clou : La Poste devra, dans un délai de deux mois à compter de la notification de son jugement, de promouvoir l'intéressa dans le grade correspondant à la date du 30 novembre 2005 avec toutes les conséquences pécuniaires qui y sont attachées.

Ce que dit l'article 40 du décret du 14 mars 1986
Le temps passé en congé pour accident de service, de maladie, de longue maladie ou de longue durée avec traitement, demi-traitement ou pendant une période durant laquelle le versement du traitement a été interrompu en application des articles 39 et 44 du présent décret est valable pour l'avancement à l'ancienneté et entre en ligne de compte dans le minimum de temps valable pour pouvoir prétendre au grade supérieur. Il compte également pour la détermination du droit à la retraite et donne lieu aux retenues pour constitution de pension civile.


Notes

Voir aussi

Sources


 
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