France : Corinne Lepage accuse le gouvernement de limiter le champ d'action des associations de protection de l'environnement
Publié le 31 juillet 2011
Le Gouvernement a publié le 13 juillet 2011, un nouveau décret sur la représentativité des associations de défense de l'environnement. Cette parution en catimini, en pleine période de congés d'été, a provoqué la colère de Corine Lepage[1] qui y dénonce une turpitude du pouvoir. « Les mauvais coups se font généralement le 14 juillet ou le 15 août. C'est encore plus tentant en période de crise majeure, comme actuellement. C'est sans doute pour cette raison que le Journal officiel du 13 juillet publie un nouveau décret concernant les associations. » écrit-elle dans Rue 89.
Le texte modifie la partie réglementaire du code de l'environnement en y insérant des conditions très restrictives pour qu'une association soit représentative.
Ce décret est complété par un arrêté paru le même jour fixant les quantums nécessaires pour la représentativité. Il fixe très haut la barre : l'association devrait comprendre au moins 2 000 membres à jour de leur cotisation. « Ces membres doivent être domiciliés dans au moins six régions, dont aucune ne peut regrouper plus de la moitié du nombre total des membres » précise le texte. Le texte durcit encore plus les conditions de participation des associations reconnues d'utilité publique aux débats sur l'environnement.Il faut que l'association, « pour l’exercice précédant la date de dépôt de la demande, d’un nombre de donateurs supérieur à 5 000 et qu’elle exerce une activité effective sur plus de la moitié des régions. »
« Les seuls organismes ayant le droit de le faire entendre leur voix sur les politiques environnementales sont des organismes publics au sein desquels seules ces grandes associations ont le droit d'être représentées. De plus, l'État s'octroie le droit de vérifier les conditions de financement des associations pour s'assurer « de leur indépendance ». » tempête l'ancienne ministre de l'environnement. Elle a qualifié le texte de « est liberticide au regard de la liberté d'association ou plus précisément du droit des associations à se faire entendre. »
Dénonçant au passage l'absente de tout « texte de protection des lanceurs d'alerte » elle estime que « c'est la capacité des associations les plus dérangeantes pour les lobbies défendus par le gouvernement qui est ici mise en cause. » L'absence d'agrément pour la quasi-totalité des associations de défense de l'environnement a des conséquence très lourdes. « En effet, sans agrément, la capacité de porter plainte avec constitution de partie civile reste très réduite. Dans ces conditions, les procès mettant en cause ces lobbies deviennent beaucoup plus difficiles » relève l'intéressée. Ceci rendra très difficile la tâche des associations localement « constituées contre tel ou tel projet, telle ou telle infrastructure. Les préfets pourront toujours soutenir qu'elles ne remplissent pas les conditions. » « Ainsi le gouvernement s'est-il attaqué avec efficacité, une fois encore, aux modestes contre-pouvoirs que notre pays compte encore. » a-t-elle conclu en substance.
Plusieurs associations de défense de l'environnement ont repris l'argumentation de l'ancienne ministre et ont adressé une lettre à Mme Kosciusko-Morizet, ministre de l'environnement. Cette dernière justifie entièrement le texte qu'elle estime conforme au Grenelle de l'environnement.
Sources
- ((fr)) – Corine Lepage, « Le décret qui entube en douce les assos pour l'environnement ». Rue 89, 19 juillet 2011.
- ((fr)) – « Décret n° 2011-832 du 12 juillet 2011 ». Legifrance, 13 juillet 2011.
- ((fr)) – « Arrêté du 12 juillet 2011 ». Legifrance, 13 juillet 2011.
- ((fr)) – Célia Fontaine, « Polémique autour de la représentativité des associations ». Journal de l'environnement, 22 juillet 2011.