Irlande : un blogueur persécuté pardonne à son bourreau

(Redirigé depuis Irlande : Un jeu cruel)

Publié le 4 octobre 2012
Un blogueur politique d'origine juive, demeurant en Irlande, a été la cible d'attaques antisémites durant de nombreux mois. L'intéressé, Leo Traynor, a reçu une série de cybermessages et des colis dont le contenu n'était pas du meilleur goût. Cet harcèlement a été suffisamment intense pour qu'il en devienne malade. Il a découvert qui l'attaquait sans relâche, l'a confronté et lui a pardonné.

Genèse des faits

Le 12 août 2012, Leo Traynor a annoncé son intention de ne plus publier sur Twitter. Il invoquait entre autres que Twitter était devenu un nid à trolls depuis des mois. À la suite de son annonce, des observateurs ont écrit que sa réaction était exagérée. Il a expliqué pourquoi il a abandonné.

En juillet 2009, il publiait des tweets depuis deux ans et n'avait jamais éprouvé de souci. Il a alors reçu un message : « Sale Juif de merde » [1]. Il a alors bloqué le compte de ce lecteur et alerté les responsables de Twitter. La semaine suivante, un nouveau lecteur lui a envoyé d'autres messages insultants. Il a encore bloqué et rapporté le compte. Ce scénario se répétait deux à trois fois par semaine. Parfois, c'était deux, trois fois par jour. Voyant que ses efforts étaient vains, il a rendu son compte privé. Les attaques ont cessé pendant un moment. Son compte Facebook a été violé, son blogue a été inondé de spam et il a reçu des courriels au contenu agressif et dégoûtant. Des images de personnes mortes, de camps de concentration et de corps démembrés parsemaient les messages.

Les attaques continuent

Les attaques ont cessé pendant quelques semaines. Il croyait que le troll s'était lassé. Il avait tort.

Leo Traynor n'avait pas parlé à sa femme des attaques qu'il subissait. Elle a rejoint Twitter pour explorer ce média. Elle appréciait. Ses écrits étaient suivis, et elle ne recevait pas de messages insultants. Un jour, elle a indiqué qu'elle était l'épouse de Leo Traynor. Elle a reçu un message : « Ton mari est de la merde. Un bâtard pourri et tu es une putain » (« Your husband is scum. A rotten bastard and you're a whore »). Elle en a ri, bloqué le compte du lecteur et rapporté l'attaque. Comme pour son mari, le lecteur agressif a répété autant qu'il le pouvait. La situation était devenue intolérable pour les deux : ils ont bloqué l'ajout de tout nouveau lecteur. Sa femme a été si ébranlée par cette expérience qu'elle ne va plus du tout sur Twitter.

Des gens ont demandé à Leo Traynor pourquoi il était visé. Il croyait que ça provenait de ses opinions politiques, de son origine ethnique ou encore de ses mots croisés aux indices elliptiques.

Le calvaire atteint son paroxysme

En juin, juillet et août 2012, la situation sur Twitter a empiré. Il était inondé de messages agressifs. Puis, il a reçu un colis chez lui. Il n'était pas étonné ni méfiant, car il en reçoit régulièrement. Le contenu l'a choqué. Des cendres avec le message : « Dis bonjour à tes frères et sœurs d'Auschwitz. »[2]. Abasourdi et physiquement choqué, il en a informé les autorités. Deux jours plus tard, il a reçu des fleurs séchées avec un autre message choquant : « Tu arriveras à la maison un jour et la gorge de ta chienne de femme sera tranchée et ton fils aura disparu. »[3]. Il a encore rapporté le fait aux autorités, mais les policiers ne pouvaient rien faire.

Pendant des semaines, Leo Traynor en a perdu le sommeil, alerté par le moindre bruit, inquiet d'ouvrir la porte extérieure. Il feignait de bien se porter pour ne pas inquiéter sa femme et son fils, même s'il mourrait lentement à l'intérieur.

Dénouement de l'affaire

En juillet 2012, un ami spécialiste de réseaux informatiques lui a proposé son aide. Dans les limites de la loi, il pouvait probablement retracer le troll dans Internet. Afin de l’appâter, Leo Traynor a invité ses lecteurs à lui laisser un message sur son compte Google+, son blog ou sa page Facebook. À son grand plaisir, le troll lui a laissé des messages. L'ami informaticien a déterminé que le troll communiquait depuis trois adresses IP différentes en Irlande.

Deux étaient des bornes à accès public, mais la troisième menait à une résidence privée. Celle d'un ami. Leur fils de 17 ans était le troll.

Selon son père, l'adolescent était accro à son portable, à sa tablette numérique et à son mobile. Il était obnubilé par les sites sur les conspirations. L'ami était révulsé par ce qu'avait fait son fils et voulait le dénoncer aux policiers. Leo Traynor s'est opposé.

Les quatre personnes, l'ami, sa femme, leur fils et Traynor, se sont rencontrées dans un lieu discret, l'adolescent ignorant que Traynor serait présent. Après avoir partagé sur l'école, Traynor a commencé à montrer à l'adolescent les messages, les images ainsi que les photographies des colis qu'il a reçus. Il a ensuite détaillé l'enfer de ses nuits et de ses jours à chercher qui pourrait faire du mal à sa famille, au point d'en devenir paranoïaque.

L'adolescent s'est mis à pleurer. Leo Traynor lui a demandé « Pourquoi ? »

« Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je suis désolé. Ça ressemblait à un jeu. »[4]

Leo Traynor a décidé de ne pas poursuivre en justice l'adolescent, même si les parents étaient prêts à le faire. Traynor a cependant promis qu'il le ferait si l'adolescent ne s'amendait pas et ne suivait pas un traitement.

Notes

Sources

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  •   Page « Irlande » de Wikinews. L'actualité irlandaise dans le monde.