Le président soudanais Bachir arrive au Tchad malgré un mandat d'arrêt international

Publié le 21 juillet 2010
Malgré un mandat d'arrêt international émis par la Cour pénale internationale (CPI) depuis près de deux ans, Omar Hassan el-Bechir ou Omar al-Bachir, actuel président du Soudan, est arrivé au Tchad aujourd'hui. Accueilli en personne à sa descente d'avion par son homologue tchadien, Idriss Déby, le président Bachir doit séjourner jusqu'à vendredi à N'Djamena pour assister à un sommet des États sahélo-sahariens, qui se tient jeudi et vendredi, selon le programme officiel.

Omar el-Béchir

Khartoum a signé mais pas ratifié le traité constitutif de la Cour signé en 2002 à Rome, alors que le Tchad s'est soumis en 2007 à la juridiction de ce premier tribunal pénal international permanent qui siège à La Haye. Pourtant, le ministre de l'Intérieur et de la Sécurité tchadien, Ahmad Mahamat Bachir, interrogé par Reuters, a déclaré que Bachir ne serait pas arrêté par les autorités tchadiennes. « Nous ne sommes pas obligés d'arrêter Omar Hassan al Bachir […]. Il est venu pour le sommet [des pays sahélo-sahariens] et il repartira sain et sauf. Le Tchad est un État souverain et indépendant. […] Nous ne dépendons pas des injonctions des organisations internationales », a-t-il également déclaré.

Aux Pays-Bas, un porte-parole de la CPI a affirmé que les autorités de N'Djamena étaient légalement tenues d'arrêter Bachir car « le Tchad et tous les États membres doivent appliquer les décisions des juges et coopérer à une demande d'arrestation ». L'ONG Human Rights Watch a, quant à elle, un peu auparavant, incité le Tchad soit à refouler le président soudanais, soit à l'arrêter pour le livrer à la CPI, faute de quoi il se « distinguerait en étant le premier État partie prenante à la CPI à protéger de la cour un criminel de guerre présumé ». Ce dernier est accusé de crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide dans le cadre de la guerre civile au Darfour.

Le problème se situe au niveau des pouvoir de la CPI, qui ne dispose pas de police ad hoc pour faire exécuter ses décisions et ne peut compter que sur la coopération des États qui reconnaissent sa juridiction. Le Tchad est donc placé dans une situation inédite, Bachir ne s'étant déplacé jusqu'à présent que dans des pays hors du champ juridictionnel de la CPI.

Poursuites judiciaires

Le 14 juillet 2008, le procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno Ocampo, demande aux juges de la CPI d'émettre un mandat d'arrêt à charge d'Omar el-Béchir parce qu'il aurait commis des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre au Darfour[1]. Cette demande a été critiquée par certains : le procureur est accusé de s'occuper plus de politique que de droit international et de ne pas prendre en compte la situation politique locale, tandis que l'accusation de génocide est qualifiée de « rhétorique militante » irréaliste[2].

Le 4 mars 2009, la CPI émet un mandat d'arrêt international à l'encontre d'Omar el-Béchir, accusé de crimes contre l'humanité et crimes de guerre[3]. Puis, le 12 juillet 2010, après appel du procureur de la CPI, un second mandat d'arrêt international est prononcé à son encontre, cette fois pour génocide[4]. Bechir devient le premier chef d'État en exercice à être sous le coup d'un mandat d'arrêt international.

Amélioration des relations entre les deux pays

Après cinq ans de guerre par groupes rebelles interposés, le Tchad et le Soudan ont entrepris de normaliser leurs relations et ont signé, mi-janvier à N'Djamena, un accord assorti d'un « protocole de sécurisation des frontières ». Peu après son arrivée à l'aéroport vers 16 h 30 (UTC+1), Omar el-Béchir a d'ailleurs déclaré aux journalistes que sa « présence à N'Djamena témoigne de notre volonté de tourner la page après les différends qui ont opposé nos deux pays ». « Nous sommes dans une nouvelle phase de l'histoire de nos deux pays, dans l'intérêt de nos deux peuples », a également dit le président soudanais, effectuant sa première visite depuis 2009. Le Tchad s'aligne sur la position de l'Union africaine (UA), qui a décidé de ne pas coopérer avec la CPI après l'émission du premier mandat d'arrêt en mars 2009, notamment dans la gestion de la crise du Darfour. « Nous sommes attachés à la position de l'Union africaine. […] Tout le monde travaille pour la résolution de la crise du Darfour », selon le ministre tchadien des Affaires étrangères Moussa Faki Mahamat, ajoutant : « La priorité pour nous, c'est la paix au Soudan ».

Notes

Sources

Voir sur Wikipédia l'article
Omar el-Béchir.



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