Lezbulles et inauguration du 15ème Printemps lesbien

Publié le 1er avril 2012
Ce samedi 31 mars 2012 a eu lieu l'inauguration du 15e Printemps lesbien à Toulouse, un évènement unique en France réunissant sur plus d'un mois de nombreuses actrices de la culture lesbienne francophone et internationale. Organisé par Bagdam Espace Lesbien, association politique et culturelle basée Toulouse, le printemps a commencé par un vernissage de BD, suivi du concert du groupe Système D et d'une fête animée par DJettes Rebellesound & Joséfine, le tout au café culturel Folles Saisons.

Les Chroniques mauves, 70 ans d'histoire lesbienne en 224 pages modifier

 
Soizick Jaffre, Cab et Catherine Feunten, une partie de l'équipe des Chroniques mauves.

La première œuvre présentée est Les Chroniques mauves, un roman graphique de 12 épisodes racontant l'histoire des lesbiennes : le roman commence avec le départ, dans les années 79 d'une lesbienne de 20 ans, originaire de Bretagne, pour finir avec la marche des fiertés de 2011 à Paris. À travers les 12 épisodes sont évoqués les problèmes généraux du lesbianisme, tel que la transsexualité ou la sexualité des femmes âgées, sur le modèle des Chroniques de San Francisco et de The L Word.

« J'ai écrit Les Chroniques mauves car j'avais envie de raconter l'histoire des Lesbiennes » explique Catherine Feunteun, la scénariste ayant porté le projet pendant deux ans. « Je fais de la prévention contre le SIDA et j'ai remarqué que les gays n'ont aucun mal à parler de leur histoire, de Stonewall. Alors que, pour les lesbiennes, il y a une inhibition, un déni d'histoire. De plus, je trouvais qu'on parlait beaucoup de sujets très féminins, comme le couple, l'homoparentalité, en oubliant que ce sont les lesbiennes qui ont sorti les féministes du carcan hétérosexuel. Monique Wittig, par exemple, a totalement redéfini ce que signifie être une femme et, lorsqu'elle a dit « les lesbiennes ne sont pas des femmes », elle a prononcé la phrase la plus importante du XXème siècle. »

Étant issue de l'univers audio-visuel, Catherine Feunteun commence à réunir plus de 150 heures d'interviews et de reportages afin de réaliser un documentaire télévisuel. « Mais 90 minutes uniquement sur les lesbiennes, aucune télé n'en a voulu ». Ne voulant pas que son travail reste vain, elle transforme son documentaire en roman graphique et se met à rechercher des illustratrices. Elle rencontre alors Soizick Jaffre, qui devait à l'origine illustrer l'ensemble du roman graphique. La tâche se révélant de trop grande ampleur, Les Chroniques mauves représentant plus de 1 500 dessins, elles décident de recruter de nouvelles illustratrices : Carol Maurel, qui en réalisera deux, et Cab, La Grande Alice et Louise Mars, qui en réaliseront un chacune : « beaucoup de personnes du milieu de la BD m'ont dit qu'un projet avec plusieurs illustratrices ne marcherait pas, que les lecteurs allaient se perdre. Pourtant, je n'ai eu que de bons retours. Pour assurer la cohérence globale, j'ai donné des indications basiques sur les personnages : Chris, le personnage emblématique, a des tâches de rousseur et les cheveux courts et blonds. Mais pour le reste, je les ai laissées libres d'exprimer leur interprétation propre de chaque personnage. »

Parmi l'ensemble des épisodes, le préféré de Catherine Feunteun est sans contexte le dernier, qui confronte un couple de lesbiennes de 65 et 70 ans, ensembles depuis 30 ans, à un homme homosexuel de 50 ans : « d'abord, je voulais interroger les jeunes lesbiennes, qui peuvent changer de copines rapidement, au bout de quelques mois. Comment imagine-t-on ce que signifie passer 30 ans ensemble quand soi même on a 20, 25 ans ? Ensuite, je voulais parler de ce sujet triplement tabou : la sexualité des femmes, la sexualité des lesbiennes, la sexualité des personnes âgées. Je voulais montrer comment, après la ménopause, elles arrivaient à développer une sexualité douce, multiforme, féminine, totalement dans le laisser-aller. Une sexualité qui tient plus de la sensualité. Et je voulais confronter cela avec la violence que subissent les PD de 50 ans, qui se font jeter des backrooms, comme si tout était fini pour eux ».

La Lumière au fond du placard, manuel de lesbianisme à l'usage des jeunes lesbiennes et de leur entourage modifier

 
Public au vernissage.

La seconde partie du vernissage était consacrée à Gami, dont le BD blog La Lumière au fond du placard va être bientôt édité aux éditions Dans l'engrenage. « Mon but est double. D'abord, je m'adresse aux jeunes filles et femmes qui se découvrent lesbiennes, et je leur dis que ce qu'elles vivent, on est toutes passées par là. Ensuite, je voulais expliquer à l'entourage des jeunes lesbiennes ce par quoi elles peuvent passer, afin qu'ils puissent mieux la comprendre ; la communication n'est pas forcément facile naturellement alors c'est bien d'avoir d'autres moyens de mieux se comprendre. »

Si, dans son blog, Gami réagit beaucoup à l'actualité, comme à la position de Nicolas Sarkozy sur le mariage homosexuel, la version publiée ne reprend que les différentes étapes d'une jeune lesbienne. « Mon éditrice m'a contactée via le site communautaire yagg pour me proposer d'adapter le blog en version papier, qui est beaucoup plus détaillée. Par exemple, je n'avais fait qu'une seule planche sur le coming out, alors qu'il y en a plusieurs dans l'adaptation. »

Allo ? témoignage sociologique d'une époque modifier

Enfin, Laura Bernard est venue présenter Allo ?, un projet de BD réalisé sur sept ans avec Danielle Charest et interrompu depuis la mort de cette dernière. « C'est l'histoire d'une lesbienne québécoise arrivant à Paris et, plus généralement, un témoignage sociologique du milieu lesbien. De plus, en arrière-plan de chaque planche, il y a un témoignage des inégalités qui choquaient Danielle : discriminations d'orientation sexuelle, de genre… Comme l'écriture prenait beaucoup de temps, nous avons eu sans cesse besoin de réécrire des morceaux. Par exemple, nous avons dû convertir tous les francs en euros. Et puis, les deux personnages principaux passent leur temps dans les cabines téléphoniques, alors que maintenant, plus personne ne les utilise. C'est là que nous avons compris que cet anachronisme est en fait une force. »

Comment Laura Bernard envisage-t-elle l'avenir de l'œuvre maintenant ? « Je vais présenter plusieurs planches à Cineffable, déposer une version PDF à la maison des femmes. Mais, sans Danielle, je ne me sens pas la légitimité de mener le projet au bout. »

Sources modifier


 
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