Manœuvres politiques à trois jours de l'ouverture du procès d'UBS aux États-Unis

Publié le 10 juillet 2009
À quelques jours de l'ouverture lundi de la procédure civile entamée par le Département de la Justice des États-Unis contre la banque suisse UBS devant le Tribunal de Miami, le juge Alan Gold a demandé au gouvernement américain de clarifier sa position en précisant, en particulier, s'il serait prêt à aller jusqu'à saisir les biens de l'établissement. Du côté suisse, le Conseil fédéral a interdit à la banque de livrer les données demandées.

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L'affaire a éclaté aux États-Unis le 19 février à la suite de la parution d'un communiqué de presse du Département de Justice[1] dans lequel les autorités du fisc américain, l'Internal Revenue Service (IRS), informe avoir réclamé à la banque les données personnelles des détenteurs américains ou domiciliés aux États-Unis de 52 000 comptes, répartis en 20 000 dépôts de titres et 32 000 comptes en argent liquide.

Au début du mois de mai de la même année, les autorités suisses qui s'impliquent dans cette affaire au nom de la convention de double imposition signée entre les deux États, adressent au tribunal de Miami un mémoire appelé amicus curiae qui, comme le prévoit le droit américain, lui permet d'exposer sa position sans toutefois prendre officiellement part à la procédure[2]. Dans ce document, la Suisse relève en particulier que les données demandées se situent sur le territoire helvétique et que la tentative de contrainte contre l'UBS s'apparente donc à une atteinte contre la souveraineté suisse.

Pendant les mois suivants, l'UBS va faire tout son possible pour suspendre la procédure, en vain. Le fisc américain l'accuse en effet d'avoir aidé des milliers de clients américains à dissimuler des avoirs et, sans possibilité d'accuser directement les fraudeurs, se retourne contre la banque elle-même. Pour sa part, en accord avec la convention de double imposition en vigueur entre les deux pays, la banque informe « ne vouloir transmettre que les données des comptes dont les noms des détenteurs sont livrés par les autorités américaines ».

Dans un communiqué de presse paru le 8 juillet, le Département fédéral de justice et police indique que le droit suisse interdit à l'UBS d'obéir à une injonction allant dans le sens de l'avis des autorités américaines qui déclaraient, le 30 juin 2009, « [que] la banque ne serait pas poursuivie si elle communiquait les informations demandées ». Dans ce même communiqué, les autorités helvétiques précisent qu'une décision de principe a été prise par le Conseil fédéral selon laquelle « toutes les mesures nécessaires seront prises pour l'empêcher de livrer aux autorités civiles américaines les informations exigées »[3]. Dans le but de prouver que la violation du secret bancaire est punissable par la loi, la Suisse fait parvenir deux jours plus tard au tribunal de Miami, un document présentant le jugement en 2007 de Marc Rich, membre de la direction de la Banque cantonale de Bâle-Ville, qui avait été condamné à trois mois de prison pour avoir transmit des données sur des clients à des enquêteurs allemands. Enfin, les avocats américains représentant la Confédération déclarent « [que] le gouvernement serait prêt à ordonner une saisie des données concernant comptes concernés », empêchant ainsi la banque de violer les lois suisses.

À quelques jours de l'ouverture du procès, les autorités suisses, par la voix du président de la Confédération Hans-Rudolf Merz, n'excluent pas la possibilité d'un arrangement extra-judiciaire. Cette possibilité avait déjà été évoquée il y a quelques jours par la ministre de l'Économie Doris Leuthard, en visite aux États-Unis. Selon les experts, cette solution coûterait entre 2 et 10 milliards de francs suisses à l'UBS. Le procès, quant à lui, ne devrait durer que trois jours et pourrait déboucher, sur un retrait de la licence bancaire américaine pour l'établissement suisse.

Références

  1. * Communiqué de presse : ((en)) « United States asks Court to enforce summons for UBS Swiss bank account records ». Departement of Justice, 19 février 2009.
  2. ((en)) Amicus Brief of Government of Switzerland
  3. * Communiqué de presse : ((fr)) « Le droit suisse interdit la transmission de données sur des clients ». admin.ch, 8 juillet 2009.

Sources