Accords secrets entre Israël et la Syrie sur le Golan ?

Publié le 17 janvier 2007
Le grand quotidien israëlien de gauche Haaretz a révélé dans son édition d'hier (16 janvier 2007) que, malgré la rupture officielle des contacts entre Israël et la Syrie après l'échec des négociations bipartites sur le retrait des troupes israéliennes du plateau du Golan en l'an 2000, les deux voisins ennemis auraient mené des négociations secrètes pour résoudre ce sérieux contentieux datant de l'annexion du territoire en 1981, cette dernière n'étant pas reconnue par la communauté internationale. Les négociations, toujours selon le quotidien hébreu, auraient eu lieu en Europe de septembre 2004 à juillet 2006, c'est-à-dire avant que la dernière guerre au Liban entre l'État hébreu et le parti chiite Hezbollah n'éclate. La tenue de ces pourparlers aurait été à l'initiative du président syrien Bachar el-Assad. Le rôle de médiateur(s) auraient été confié dans un premier temps par des Turcs (jusqu'à l'été 2004), puis à un Européen non identifié par Haaretz. Le nom de Geoffrey Aronson, ressortissant américain appartenant à la Fondation pour la paix au Proche-Orient (dont le siège est à Washington), est également cité comme ayant participé aux tractations.

Carte de localisation du plateau du Golan (en anglais)
Localisation d'Israël (en rouge) et de la Syrie (en vert)
Vue du plateau du Golan

Le document publié pour appuyer ces affirmations, texte non signé établi en août 2005 et mis à jour lors des très discrètes réunions européennes qui auraient donc eu lieu, indique la teneur de ces accords : un retrait progressif des troupes israéliennes du plateau du Golan (zone dans laquelle vivent quelques 17 000 colons juifs et autant de Druzes syriens) pour revenir aux frontières d'avant la guerre des Six-Jours de 1967; Israël conserverait cependant le contrôle des eaux du lac de Tibériade et du Jourdain, et les deux pays seraient séparés par une zone-tampon démilitarisée sous contrôle conjoint et qui serait matérialisée sous la forme d'un parc (1 km à l'intérieur des frontières du côté israélien, 4 du côté syrien). Le tout se serait déroulé sur une période allant de 5 (selon les désirs des Syriens) à 15 ans (d'après la volonté d'Israël). La Syrie s'engagerait à cesser son soutien au Hezbollah chiite libanais et au Hamas palestinien islamiste, et à s'éloigner (diplomatiquement) de l'Iran.

Les deux États ont cependant démenti officiellement avoir tenu de telles négociations. Du côté de l'État hébreux, c'est le Premier ministre Ehud Olmert qui, lors d'une conférence de presse, a indiqué : « Je n'en savais rien. Personne au gouvernement n'était impliqué dans cette histoire. Il s'agit d'une initiative privée entreprise par un individu qui parlait à lui-même ». Damas a aussi contredit les informations d'Haaretz par la voix de son ancien Ministre des Affaires étrangères, Mahdi Dahkhallah qui a déclaré que « la Syrie a toujours dit qu'elle ne croyait pas aux contacts secrets » et « qu'elle n'a rien à cacher sous la table ». Le quotidien livre cependant les noms des personnes qui auraient conduit les négociations : ce seraient Alon Liel ancien haut diplomate, pour Israël, et Ibrahim Souleiman, pacifiste américano-syrien qui aurait été chargé initialement du message d'ouverture du président syrien. Haaretz précise de plus que l'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon (actuellement dans le coma) était parfaitement au courant de ces négociations, comme d'ailleurs l'actuel Premier ministre, et que des officiels de haut rang syriens comme le vice-président Farouk Chareh et le chef de la diplomatie Walid Mouallem auraient eu plusieurs entrevues (huit en tout) avec Ibrahim Souleiman. M. Liel a déclaré au micro de la radio publique israélienne qu'il « n'avait pas été mandaté officiellement » pour mener ces discussions. L'ancien responsable israélien des négociations (officielles) avec la Syrie, Itamar Rabinovich, a insisté sur le fait que « par définition, (ce genre de contacts) doit rester officieux et secret » et que « dès l'instant où un tel secret est éventé, le canal est mort et c'est fini. »

Cependant, quelle que puisse être la réalité de l'existence de négociations entre la Syrie et Israël, aucune des deux parties ne pourra négliger l'influence des USA, alliés de l'État hébreux, pour lesquels Damas est l'un des meilleurs soutiens de l'insurrection irakienne et qui ont en représailles imposé des sanctions économiques à partir de mai 2004.

Sources